À partir de l’âge de 4 ans, j’ai fréquenté quelques pensionnats, et cela pendant douze ans. Je peux dire qu’il y avait, dans ces milieux religieux, de bonnes et de mauvaises personnes. Cependant, ce qui me frappe, devant les demandes des Autochtones, c’est qu’aucunes de nous n’avons pensé demander des excuses pour les maltraitances ou sévices moraux et physiques que parfois les sœurs nous faisaient subir. Je me contente de vous citer deux exemples qui m’ont marquée à jamais :  

Toutes petites, nous avions une peur terrible des orages, surtout pendant la nuit. Pourquoi, me demanderez-vous? Parce que pendant ces nuits effrayantes, les sœurs passaient de cellule en cellule, priant très fort, tout en nous aspergeant d’eau bénite. Réveillées, nous tremblions de tous nos membres, la peur au ventre, espérant que le diable nous laisse enfin tranquille.

Le pape Pie XII (ce pape qui affectionnait Hitler et les nazis) étant tout près de la mort, les sœurs manipulaient nos jeunes esprits, en nous suggérant fortement de porter le cilice, ces ceintures, bardées d’épingles ouvertes que nous attachions autour de notre taille, à l’intérieur de nos vêtements et qui s’incrustaient douloureusement dans nos chairs. D’autres se promenaient des jours entiers avec des roches dans leurs souliers.

Et ce ne sont pas les seules horreurs que nous avons vécues, nous aussi, enfants blancs, confiés par nos parents blancs, dans des pensionnats dirigés par les communautés religieuses de l’époque.

Devrions-nous aussi demander des excuses ?  Vous me direz que ce n’est rien comparé à ce qu’on subit les enfants autochtones. Qu’elles n’ont pas tenté de détruire notre culture. Mais que savons-nous vraiment de ce qu’elles ont détruit en nous ? À ma sortie du couvent, à l’âge de 16 ans, je changeais de trottoir lorsque je les rencontrais dans la rue.